Tous voués au sinistre cancer, alors?
On pourrait le craindre, quand on apprend que David Servan-Schreiber, malgré sa vaillance et son long combat (19 ans!) est à nouveau menacé par cette bête immonde qui a élu domicile dans son cerveau. Génial, ce cerveau, promis dès le plus jeune âge au plus billant avenir par son papa, Jean-Jacques (JJSS, que ses amis surnommaient le Kennedy français).
Nous partions ce jeudi 16 juin pour trois jours dans notre île, fatigués par un long, long week-end un peu trop gastronomique, suivi de deux jours de réunionite aiguë. Notre brave Husky nous permet de telles absences sans nous en tenir la moindre rigueur au retour si, en bon chef de meute, je lui ramène bien la viande promise. En route, une halte de réapprovisionnement en lectures à Saintes, où je repère ce petit livre dont le titre effraie d’emblée et rassure tout de même un peu. On se dit que la longue lutte que l’on sait n’est pas finie, que l’immense courage face à la « camarde » que chantait Brassens, ne fera jamais défaut :
Et dès la première page, quelle émotion :
« C’était le 16 juin de l’année dernière… » – Un an jour pour jour, donc, en ce 16 juin 2011. – « … J’avais passé une IRM, et le résultat n’était pas brillant. Les résultats montraient une boule gigantesque, tout infiltrée de vaisseaux, qui remplissait dans mon lobe frontal droit la cavité creusée par les deux opérations que j’avais subies bien des années auparavant. »
L’acharnement du malheur donc, le retour de la mort qui retrousse les dents et menace à nouveau. Alors qu’on croyait bien l’avoir jugulée. À force de volonté, d’intelligence, de courage, de vouloir survivre, vivre encore. Non pas égoïstement, mais pour mieux partager avec nous tous cette expérience exceptionnelle, d’une longue lutte avec au bout la victoire espérée, entrevue, que l’on a toujours crue possible, en laquelle on croit encore, malgré deux rechutes et deux très lourdes interventions.
David Servan-Schreiber, j’ai pour lui, nous avons tous pour lui, et plus que jamais, beaucoup de tendresse et de reconnaissance. Pour tout ce qu’il nous a enseigné. Tous ces savoirs, ces compétences d’un savant, et peut-être surtout ces attitudes modelées par un courage indomptable et une grande dignité, celle de l’homme qui, à sa façon, triomphe toujours de la mort qui le guette – c’est sa vocation, et le cancer est un de ses plus dévoués et sinistre auxiliaires – Même si elle finit par l’emporter.
Et David, face à ce Goliath tout puissant, ne se voile pas la face. Même s’il ferme les yeux et refuse de voir les images de ce qui se révèle être, non un œdème, mais « une méchante tumeur ». Il ne veut pas voir, mais « tout savoir… » (de ce regard scrutateur de l’intelligence) « … sur elle pour pouvoir me défendre au mieux ».
Cette réplique, cette nouvelle terrible secousse, c’est peut-être « the Big One » redouté des californiens. Eh bien non! il ne sera pas dit que « Celle-là, je n’y arriverai pas ». David convient qu’il y a là « du déni », mais affirme que ce déni est positif, salutaire : « Toute ma réflexion me conduit à penser que ce qui « aide à vivre » aide en fait la puissance de vie inhérente à tout organisme vivant. Et, inversement, tout ce qui ronge l’envie de vivre diminue nos capacités de guérison. »
« Pour être tout à fait honnête, une partie de moi s’était mise à croire – en douce – que ça ne reviendrait pas. Mais la partie la plus raisonnable n’avait jamais cessé de se dire : « Ça reviendra. » Et elle ajoutait : « Quand ça reviendra, on gérera. » Et c’est ce que j’ai fait… »
…Après le test « du vélo » qu’il raconte joliment en pp 12 et 13…
Et David, se bat, vaillamment. Épuisé, il participe pourtant au Mans à une conférence internationale sur.. la fatigue. Surmoi, quand tu nous tiens, …tu nous surmontes bien… Il va subir à Cologne, où il est coincé par l’urgence, une Nième intervention au cerveau. Très entouré – son épouse enceinte, ses quatre frères, une vingtaine de cousins, une foule d’amis -, il étonne par son courage : « J’ai tout de suite su, sans l’ombre d’un doute, que j’allais faire ce qu’il fallait ». Et il proteste : « Ce n’est pas de l’héroïsme de ma part. Je pense que le découragement s’installe quand la souffrance dure trop longtemps. Ou les nausées, l’invalidité, l’humiliation – qui sont toutes des formes de souffrance. J’ai réussi jusqu’à ce jour à les éviter en grande partie. J’espère que cela durera. »
L’anesthésie l’effrayait, par la crainte de ne pas se retrouver. Sitôt réveillé, il fait sur son drap « des gammes » de sa main gauche « pour vérifier qu’on ne m’avait pas enlevé trop de choses importantes dans mon lobe droit. Quand ma main avait obéi, j’avais éprouvé un énorme soulagement. »
À Louvain, on lui concocte un vaccin original, très innovant : On dérive la circulation sanguine du patient, sépare les globules blancs des rouges avec une centrifugeuse. Puis on confronte ces globules blancs avec l’ennemi, la tumeur qu’on avait mise de côté. Très vite, ils sont sensibilisés à ce danger, et une fois de retour dans l’organisme, ces vaillants marins vont se jeter, pleins d’une force acquise, sur la moindre cellule cancéreuse qui rappelle le combat mené hors des vaisseaux. Ça marche (20% de réussite complète), foi de Pittsburg – et de Louvain, une fois – sauf que cette fois, la nouvelle tumeur, (en dépit – ou à cause) de l’implantation de billes radioactives dans le vide laissé par l’ablation et chargées des finitions délicates en cas de malencontreux oublis, cette tumeur était une mutante. C’est d’ailleurs ce danger de mutation que l’on craint quand on tente de trouver un vaccin contre le sida et qu’on en titille le virus pour l’affaiblir et le rendre vulnérable aux défenses naturelles de l’organisme.
Il va donc falloir, dès la seconde IRM de contrôle, une nouvelle opération ! Et on prépare un autre vaccin ! Et on a toujours, malgré la peur lucide, un énorme courage. David est dans l’année de ses 50 ans. Cela fait presque 20 ans qu’il se bat et tient à distance la mort qui menace encore et encore.
Et comme tous les survivants ( il en est, puisque la survie, dans 98% des cancers de ce type, ne dépasse pas 6 ans!), sa maladie l’a oublié parce qu’il s’est oublié et qu’il s’est consacré aux autres, à la prévention du cancer par une alimentation et un style de vie appropriés.
« Guérir » et « Anticancer » sont ses ouvrages précieux qui racontent l’expérience douloureusement acquise par David Servan-Schreiber et sa compétence dans le domaine de l’alimentation.
Tenez, lisez ici https://toutpetits.wordpress.com/2008/10/06/4-manger-dr-serge-renaud-david-servan-screiber-dr-beliveau/
et là encore : https://toutpetits.wordpress.com/2008/10/07/la-soupe-anti-cancer-du-pr-richard-beliveau-et-le-choeur-des-souris-quasi-gueries/
Vous retrouverez dans ces articles deux autres « grands » de ce combat farouche contre le cancer, le Pr Belliveau et le Dr Gingras. Je reprends, – je me cite :
« Quelques-unes des découvertes essentielles de ces trois chercheurs :
« – Nous sommes tous potentiellement cancéreux (à 98% révèlent les biopsies d’organes sains) : dès l’enfance, sans doute dès la naissance, nous avons en nous des germes, des « graines » de cancer, des cellules qui pourront se différencier et se mettre à se multiplier de façon anarchique, illimitée, des cellules immortelles, qui refusent de mourir, ne savent pas mourir comme les braves cellules « normales » qui par leur sacrifice et leur renouvellement « normal » assurent croissance et vie – « si le grain ne meurt » – , et qui toutes restent là, squattent et encombrent de plus en plus, et du coup, torturent en lésant les terminaisons nerveuses, et telles des affamées sans vergogne vont coloniser des zones saines de l’organisme et finir par détruire le corps (animal et même végétal) qu’elles parasitent »
David Servan-Schreiber pense lui aussi qu’un des secrets de la future victoire réside dans l’alimentation en particulier, et plus généralement dans la « gestion » de nos organismes, de nos défenses, de nos vies.
D’ailleurs ce langage de gestionnaire c’est celui qu’il emploie quand il a la certitude de sa rechute : « Je me suis mis presque immédiatement en mode gestion »
Et il affirme catégoriquement « Anticancer » n’a rien perdu de sa validité ».
Mais je pense que le bébé qu’attend sa femme Gwenaëlle est pour beaucoup, aussi, dans ce farouche désir de vivre.
« J’ai décidé de ne pas aller en maison de repos pour ma convalescence. Ma femme était sur le point d’accoucher et je tenais absolument à être présent pour la naissance de ma fille Anna . Cette magnifique aventure, je voulais en être. »
(À suivre)
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