Stupeurs et tremblement

« Stupeur et tremblements« , en titre d’un roman d’Amélie Nothomb. Rien à voir avec les catastrophes naturelles que subissent actuellement les Japonais. Jusqu’en 1947, en présence de l’Empereur, considéré comme un dieu vivant, le protocole imposait qu’on lui témoigne sa révérence « avec stupeur et tremblements ».

Stupeurs et tremblement, en titre de cet article. Vous remarquez comme une migration du s, qui est passé d’un terme à l’autre :
Un seul tremblement (de terre), même s’il y a comme toujours une multitude de répliques – plus de 200 nous dit-on, ce lundi matin;
– et des stupeurs multiples.
Ces changements me semblent mieux rendre compte des réalités :

Une stupeur immédiate, évidente, des victimes, des témoins, qui assistent, impuissants, sidérés, pétrifiés, stupéfaits et comme stupides, au déchaînement des forces de puissances colossales. Cette puissance paralysante qu’ils ne peuvent ni comprendre, ni admettre, et qui fait perdre jusqu’aux réflexes salvateurs.
Cette stupeur, les malheureux Japonais vont la subir, pour beaucoup à trois reprises, s’ils survivent aux premières catastrophes :

– au moment des terribles premières et interminables secousses du tremblement de terre initial pour un très grand nombre d’entre eux;

– à la vue de la vague monstrueuse – plus de 20 mètres – qui, dans le Nord-Est, les a emportés, dans la rue, dans leur voiture, dans leur maison (sur son toit, pendant 48 heures pour un des rares rescapés de ce chamboulement…);

– à la vue et à l’annonce des très probables explosions puis fusions des réacteurs des centrales nucléaires submergées.

Une autre stupeur, qui a précédé, autrement plus grave et dangereuse pour les futures victimes, une stupeur intellectuelle, qui a semblé frapper d’inertie stupide, d’indécision, de perte de toute clairvoyance et du moindre bon sens, des décideurs qui savent qu’ils seront, quoi qu’il arrive, toujours bien à l’abri,
Cette stupeur face aux priorités dans les choix énergétiques les a, depuis bien longtemps, comme figés, bloqués sur le merveilleux « tout nucléaire » (99% de la recherche pour le seul atome dans le domaine énergétique) qui allait assurer, promis, juré, notre indépendance énergétique et permettre toutes les boulimies consommatrices.
Sauf que nous devons acheter notre uranium au Niger et avoir des amabilités compromettantes.
Sauf aussi que notre technologie est celle des États-Unis…

Au total nous sommes nucléodépendants, et aucun sevrage possible, car on n’a – volontairement – préparé aucune alternative énergétique. Et on nous ricane qu’il reste, si on préfère, les bougies du Père-Noël pour l’éclairage, et, pour le chauffage, peut-être les allumettes d’une petite fille D’Andersen…

Les macaques baigneurs ont dû encore plus trembler.

Eux qui, déjà, tremblent de froid dans leurs îles si septentrionales, et qui, dès -5° se réfugient dans les sources d’eaux chaudes, eux qu’on voit si transis, comme penauds et résignés, la tête dans les épaules, comment ont-ils vécu ces drames successifs?
Les ont-ils ressentis depuis leurs forêts du Nord-Ouest du Japon?
Oui sans doute, avec leurs radars ultrasensibles, et à coup sûr ceux qui sont apprivoisés et vivent, comme leurs maîtres, dans tout le Japon. Ont-ils une « science » des séquences de secousses. Savent-ils reconnaître à leur rythme, à leur accélération l’imminence d’un séisme dangereux? Savent-ils alors témoigner de leur angoisse soudaine et ainsi alerter leurs partenaires humains d’infortune?
Macaques japonais

J’en suis persuadé, mais on ne sait pas assez les observer, eux qui pourtant symbolisent la Sagesse.
Revoyez-les, ici, au bas de ce long texte.

« Le macaque japonais est le seul singe qui vive en liberté au Japon. Il existe un bas relief ancien dans le temple de Nikko qui représente trois de ces singes, connus du monde entier.
Le premier se bouche les oreilles pour ne rien entendre, le second cache sa bouche pour ne rien dire, le troisième se voile les yeux pour ne rien voir. Ils sont devenus le symbole d’une sagesse à l’orientale qui consisterait à ne pas se mêler des affaires des autres. » (http://www.pratique.fr/macaque-hommes.html) »

L’un aveugle, l’autre sourd, je les présentais, dans ce précédent article, comme les symboles du citoyen, idéal par sa docilité née d’une ignorance confiante et naïve.

Et je concluais ainsi :

« Cela pourrait être une allégorie du bon citoyen idéal, bien anesthésié, bien insensible, une représentation de l’autisme individuel refuge pour survivre dans une société devenue folle, une société de sourds-muets, aveugles de surcroît. »

On peut faire une autre interprétation de ce mutisme, bien éloignée de la sagesse bouddhiste, plus proche de ce cynisme de ceux qui savent et pourtant se taisent.

Les pauvres et braves citoyens japonais sont certes bien informés, en temps réel, mais de ce qui se passe. Tout au plus peuvent-ils se réjouir de voir ce qui se passe, cela prouve qu’ils ont survécu, qu’ils ont eu une chance inouïe, que cette machine à broyer, à noyer, à irradier aurait pu les atteindre, eux, les gagnants – provisoires de ce loto de la mort.
Et il faut de pareils drames pour qu’on sache désormais qu’on aurait pu savoir ce qui pourrait se passer. Bien trop tard pour les victimes. On ne leur avait pas dit ce qui allait se passer avec cette bombe à retardement, cette mine à triple détente – séisme, tsunami, accident nucléaire, ce merveilleux nucléaire qui impose tant de dépenses décrétées absolument prioritaires. Les sociétés d’assurances, elles, ont gardé leurs vieux réflexes et sortent leurs calculettes et nous disent : « Déjà 35 milliards de dollars de dégâts !… »
Et on a le sentiment que certains ne pleurent pas, que tout cela, tant de malheur, va être bon pour les affaires. Il va falloir rebâtir, réinvestir, comme après une bonne guerre souvent souhaitée en période de crise – et on l’a d’ailleurs bien eue, cette satanée bonne guerre, après la terrible crise économique de 29. Nous y sommes à nouveau, en pleine crise économique et financière, et le Japon en a d’ailleurs déjà bien souffert depuis quelques années.

N’importe quel statisticien aurait pu prouver que le risque zéro est un leurre en matière  de nucléaire, et que, fatalement, sur plus de 400 centrales dans le monde, plus ou moins expérimentales, déjà vieillissantes pour beaucoup, certaines allaient avoir des ennuis de santé…

Rappelez-vous « le salaire de la peur » : toutes les précautions étaient prises, on n’avait pas pensé que le second camion qui avait choisi de rouler plus vite sur la « tôle ondulée » de la piste pour ne pas faire vibrer et sauter la si susceptible nitroglycérine, allait rattraper l’autre qui lui avait le choix prudent de la lenteur. Ce fut le plus terrible suspense du film. Nous étions chacun de nous en pensée à bord d’un des camions. Nous avons été sauvés avec la fin de la portion ondulée : la tortue a pu alors bondir et échapper au lièvre qui allait la détruire.

En ce moment, nous vivons un épouvantable remake : Le salaire de l’atome – autre titre plus moderne que certains préfèrent : « Les dividendes du nucléaire »
C’est une production internationale avec un budget colossal et un casting prestigieux, dont nous connaissons de longue date les vedettes. Elles ont sévi déjà dans bien des nanars où les scénarios ne lésinent pas sur les suspenses et sur les peurs. Les bouts d’essai nous sont généreusement diffusés sur le Net.

Et nous pleurons avec les malheureux Japonais qu’accablent maintenant ces enchaînements de catastrophes gigognes, ces emboîtements inexorables de drames, ces empilements de malheurs.
« Maintenant », car la moindre once de bon sens nous fait sentir que c’est aussi sur notre avenir menacé que nous pleurons, nous qui pour l’instant sommes si éloignés géographiquement de ces malheurs de fin du monde.

Ecoutez-les, ces chantres des énergies fortes:

Le curatif  spectaculaire s’impose dans l’urgence.
« Nous avons un besoin urgent, impérieux du nucléaire, cette énergie abondante que l’on dit inépuisable.
« Notre économie est malade. Nous avons un remède de cheval : le nucléaire, vous m’en direz des nouvelles. »

Seulement voilà, c’est un cheval de Troie, qui cache dans les flancs rebondis de ses centrales, de terribles virus, d’abominables calamités potentielles.
Et ce cheval, comme un pur-sang rétif, est impossible à maîtriser.

« Il ne faut pas avoir peur du nucléaire, c’est si propre, si inoffensif. »

On peut même chanter en chœur, comme des petits cochons que nous sommes (ces p’tits cochons d’payants, qu’on nous prend pour…) :

« Qui craint le grand méchant ion?
« C’est p’t-ête vous, pas Besson ».
« Qui craint le grand méchant ion?
« Toujours nous, pas Besson ».

« Le préventif , lui, n’a rien de spectaculaire. On ne peut faire carrière politique, accéder au pouvoir avec des propositions d’énergies douces. »
« L’électeur tremblant vote mieux que l’électeur tranquille… Ne le dites pas trop fort… »

Mais ils n’auront plus nos voix, car à force de tremblements, nos mains frappées de stupeur vont s’égarer.
Vous comme moi sommes aux aguets de ces sinistres nouvelles dont on nous inonde. Nous voyons bien que désormais, il y a une logique inexorable, scientifique – c’est de la physique nucléaire – des enchaînements de catastrophes.
Le malheur bouleverse, pousse et gagne. D’abord poisson chat irrité, puis tsunami impassible, il va bientôt tout recouvrir, nuage indifférent.
N’oublions surtout pas les pauvres et braves Japonais, si dignes face à tant  d’adversités cumulées. Ce sont eux – pour cette fois – les figurants de la répétition de cette farce minable du nucléaire innocent qui nous promet encore bien d’autres tragédies…

… Si les vigilances enfin réveillées des citoyens du monde entier n’imposent pas enfin une salutaire prise de conscience et un débat participatif sur le thème de notre avenir énergétique.

Feuërstein et son PEI, encore et toujours.

J’emprunte cette photo récente de Reuven Feuërstein au site des éditions « Le bord de l’eau » http://www.editionsbdl.com/feueurstein.html

Ces éditions « Le bord de l’eau », au nom si joliment naturel et écolo, je vous en ai déjà parlé dans cet article https://toutpetits.wordpress.com/2009/08/04/cyrulnik-petite-enfance-et-grand-age/ à propos d’un petit livre de Boris Cyrulnik sur la résilience.


Feuërstein, encore et toujours : Cette photo témoigne bien de son grand âge. Né en 1921 (en Roumanie), il va donc avoir 90 ans l’an prochain. Le dévouement aux autres, l’optimisme sont de fameux élixirs de longue vie…
Lisez attentivement les textes de cette page http://www.editionsbdl.com/feueurstein.html, et n’hésitez pas à vous procurer un autre de ces « petits bijoux » d’édition : http://www.editionsbdl.com/feueurstein.html

Wikipedia nous donne, comme souvent les liens essentiels pour une meilleure connaissance d’un sujet :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Reuven_Feuerstein
Le premier lien (voir plus haut), nous a mené aux éditions « Le bord de l’eau ».
Les trois liens suivants nous conduisent à « Upbraining » dont j’avais reçu plusieurs annonces de stages de formation aux principes et techniques de Feuërstein.
J’avoue avoir négligé ces invitations – et je le regrette vivement.
J’y voyais un côté mercantile – que je réprouve toujours : j’estime que la théorie et la pratique élaborées par R. Feuërstein sont si généreuses, si génialement efficaces, si révélatrices de possibilités en léthargie, pour tout dire si résilientes, que ce chef-d’œuvre pédagogique devrait être unanimement reconnu et mis au service de tous les souffrants par l’échec scolaire et les humiliations et doutes et mésestimes de soi qui en résultent.
Certes, il faut, pour que ces techniques ne soient pas que des recettes et qu’elles aient toute leur efficience affective, émotionnelle, durable, avoir une réelle aptitude à la médiation (tout le monde n’a pas « naturellement » les qualités de Feuërstein qui lui permettaient à 12 ans de motiver des adultes à tenter l’apprentissage de la lecture)
Mais je suis persuadé de ceci : le spectacle de la réussite, la vue du bonheur de la confiance en soi retrouvée, chez un enfant jusque là en grande difficulté, modifie le pédagogue, le médiateur.
Plus simplement : une bonne pédagogie, par la réussite qu’elle permet, métamorphose l’élève et transforme le pédagogue, le révèle à lui-même.
Permettez-moi quelques digressions sur l’échec et la souffrance scolaires :
L’échec scolaire est sans doute une des pires souffrances de l’enfance, en tout cas une des plus insidieuses, car elle installe le doute, la mésestime de soi, et très vite la résignation. La résignation chez l’élève qui croit à cette démonstration répétée, insistante de sa médiocrité, de sa nullité. Mais, pire encore, s’installe une résignation intergénérationnelle, face à la toute puissance des gênes qui semblent se liguer et reproduire encore chez les plus jeunes la misère intellectuelle des adultes de la lignée. Feuërstein, de toute son énergie, de tout son savoir a toujours refusé cette résignation si vite en place : Il soutenait que « Les chromosomes ne doivent pas avoir le dernier mot. » et que « Toute personne est capable de changement quels que soient son âge, son handicap et la gravité de son handicap. »
L’échec scolaire met en place les attitudes intellectuelles, affectives, relationnelles qui vont fabriquer le rejet et l’échec social et il semble y avoir une fatalité familiale à l’échec, à la pauvreté qui vont s’ensuivre. Les élites semblent se reproduire génétiquement comme les pauvres se multiplier naturellement.
Surtout peut-être, la pédagogie traditionnelle est impuissante, et même nocive, quand des inaptitudes à l’apprentissage (des déficits cognitifs) sont installés. Nocive, oui, car l’insistance pédagogique devient vite de l’acharnement pédagogique. Et je me demande alors qui est le plus malheureux de l’élève ou de son enseignant, surtout s’il débute et que ses inspecteurs le dénigrent et le culpabilisent : L’échec scolaire et l’échec pédagogique sont de très proches parents. L’élève en échec compense souvent par des troubles du comportement qui bien sûr aggravent son cas. L’enseignant, lui, se doit de rester digne, toute révolte lui est interdite, souvent alors il se réfugie dans la dépression qui est une sortie, une démission temporaire médicalisée.

On intervient toujours trop tard.
Le curatif en urgence, d’allure toujours plus professionnelle, d’apparence plus dévouée, entre Samu et pompiers, est toujours préféré au préventif si discret qui sait bien qu’il sera moins encensé puisque les difficultés qu’il prévient ne se manifesteront pas…

Je rêve d’un PEI encore plus efficace parce que préventif, un PEI qui intervienne avant les rencontres de l’école, même paternelle, d’un équivalent au « grand »PEI, d’un PEI destiné aux tout petits.
Quel sont donc les savoirs à transmettre à un tout petit ? Presque rien, bien peu de choses, et pourtant tout : l’essentiel en fait, qui va conditionner pour plus tard, dans l’au-delà des trois ans, toutes les attitudes à venir face aux acquisitions nécessitant concentration, efforts et mobilisation des « outils » cognitifs.
Peu de choses en effet : vouloir vivre, vouloir comprendre et savoir, vouloir s’intégrer à ce monde adulte, le comprendre peu à peu. Savoir parler…
En fait, ces savoirs, ne sont même pas des savoirs, ou plutôt ce sont des savoirs qui viennent d’eux-mêmes, qui sont la conséquence naturelle des besoins, désirs, des envies.
Cette « source claire » des désirs, des envies d’agir sur le monde pour le « saisir », dont parlaient Élise et Célestin Freinet, est inépuisable dans son cours le plus haut. Sauf de très rares exceptions elle est en place, intarissable, dès la naissance et sans aucun doute avant, dans la vie intra utérine où se prépare peu à peu une envie de naître, une envie de mieux entendre ces voix lointaines, de mieux s’ébattre, en tout cas plus au large…
Ce sont donc ces sources claires qu’il faut déceler comme des sourciers sagaces et confiants. Car en réalité, il y en a partout, presque toujours : ce sont de véritables nappes phréatiques du désir de savoir, du désir de comprendre. Et on est souvent sidéré de les voir jaillir avec la force et le débit de puits artésiens quand on a bien su les « amorcer », leur donner le plaisir du grand soleil et de la dégringolade vers les plaines de tous les savoirs, de tous les savoir faire, de tous les savoir être. Quand un de ces siphons est amorcé, il est bien rare qu’il s’arrête de lui-même, à moins de sabotages maladroits ou sadiques, comme dans « Manon des sources ».

Quand on sait que, dès sa naissance, le tout petit sait lire le monde et sait, si l’entourage est permissif et tolérant y écrire ses désirs, ses activités…, on comprend vite que les adultes qui l’ont en charge n’ont, en plus des soins matériels qu’à laisser se développer des attitudes de conquête, de recherche de contact, de plaisir d’avoir réussi.

Donc ma préoccupation essentielle du devenir des tout petits m’a fait négliger ce PEI que je jugeais trop élitiste, et destiné à des enfants, ados, plus âgés que mes tout petits.
Jusqu’à hier 11 janvier 2010 où j’ai reçu un long commentaire à ce billet de janvier 2008 :https://toutpetits.wordpress.com/2008/01/08/feuerstein-et-le-pei-programme-denrichissement-instrumental/

Ce commentaire, émanant sans doute d’une amie ou d’une collaboratrice de Christine Meyer, la fondatrice d’Up-Braining, révèle toute la profondeur humaine, toute l’authenticité de sa démarche. Comme souvent, c’est beaucoup de souffrance qui « réveille », mobilise et stimule jusqu’au succès de ce qu’on sait désormais être juste parce qu’indispensable.

Je vous laisse découvrir la densité de ce message :

« Bonjour
Formée à la méthode Feuërstein, Christine Mayer anime une formation à Paris en février 2010. En plus de la manière d’enseigner qu’on appelle la médiation, la méthode comporte des outils spécifiques qui permettent d’augmenter les capacités de raisonnement et d’apprentissage au niveau intellectuel et émotionnel, l’autonomie et la motivation (entre autres).
Par exemple, les personnes qui ont des troubles autistiques ont souvent beaucoup de mal à reconnaître leurs émotions et celles des autres. Un outil permet de développer cette intelligence émotionnelle.
Christine a elle même un fils atteint d’autisme profond (non Asperger) dès la naissance. A 6 ans, les experts (enseignants, éducateurs, psychologue, médecins) ont prédit qu’il n’arriverait jamais à apprendre à lire, à écrire, à compter. Elle a alors complètement pris en charge son apprentissage. Il a encore des difficultés pour s’exprimer à l’oral (les nerfs de son visage fonctionnent imparfaitement, c’est un handicap en plus) mais il a eu il y a 2 ans son brevet des collèges avec mention AB, il est actuellement en première et prépare son baccalauréat de français. Dernière nouvelle : il a pris le train tout seul pour aller à Paris le week end de Noël, et il a pu gérer tout seul un retard de train de 2 heures.
Christine a utilisé cette méthode avec plusieurs enfants de l’association J’AVANCE (www.javance.org ) qui ont tous progressé (passage de dernier à premier de la classe d’IMPro, réintégration en scolaire…). Elle est tellement convaincue qu’elle a choisi d’arrêter son métier de professeur agrégée de mathématique pour s’occuper d’ enfants puis de faire des formations d’adultes pour que plus d’enfants puissent en profiter.
Cette méthode ne sert pas uniquement dans le domaine de l’autisme, elle est plus générale et efficace pour différentes difficultés. Elle a également créé de nouveaux outils performants dont certains conviennent à des enfants non verbaux.
Janie Harros »

L’extraordinaire succès du fils de Christine Mayer rappelle de façon étonnante les « miracles » qu’accomplissait Feuërstein. Voilà un enfant pratiquement condamné à 6 ans qui, grâce à la « révolte », au refus de sa mère, et au génie de Feuërstein, est en passe de réussir bientôt son bac. Un adolescent qu’on a dit autiste et qui a su être assez autonome et solide affectivement pour assumer le retard de 2 heures de son train.
Je lui souhaite de tout cœur de poursuivre cette heureuse reconquête et de continuer à donner à sa maman de si légitimes raisons de fierté.

PER (Programme pour l’Épanouissement et la Réussite)

Le PER, un PEi dédié à la Petite Enfance, au Tout Petit.
Revoyez d’abord le précédent billet : Je recopie ici les deux lignes des sources de mes déjà (bien trop) longues réflexions :

Cela fait déjà bien longtemps que je tourne autour de cette idée venue du PEI du génial Feuërstein.

Le PEi a un i ambigu à l’ambiguïté savamment entretenue.
Le « E » et le « i » du Programme qu’est le PEi de Feuërstein, signifient « Enrichissement instrumental ».Ils vont bien sûr, au bout du compte, dans le sens d’un accroissement de l’intelligence, de l’efficience, du rendement, mais indirectement, grâce aux outils, aux « instruments » dont il enrichit ceux qui en bénéficient. Et c’est à cet enrichissement instrumental que visait d’abord Feuërstein : Sa vocation a toujours été le dévouement à la cause de cas souvent désespérés – un peu à la manière de Bettelheim qui ne recevait dans son École Orthogénique de Chicago le plus souvent que des « cas » refusés, rejetés de partout ailleurs.
Mais on comprend que cet aspect utilitaire, cet aspect efficience, efficacité, rendement intellectuel ait pu en tenter beaucoup, et qu’on se soit ingénié à en faire un outil quelque peu élitiste, pour tout dire souvent très loin d’être gratuit, et d’empêcher de bien mettre en œuvre sa vocation essentiellement préventive.

J’ai toujours cru en la prévention, en une possible générosité préventive qui ne permet pas que surviennent des aggravations, des détériorations difficilement réversibles. Mais quand il est déjà un peu trop tard on appelle au secours des urgences curatives et on est prêt à bien des sacrifices.

Il faut bien se pénétrer de cet esprit de prévention : là se trouve la vraie générosité, là se rencontre la pédagogie authentique des passeurs de savoir faire et de mieux être.
L’argent compromet, pervertit tout dès qu’il perd sa vraie vocation d’investissement.
Françoise Dolto a toujours été une extraordinaire pédagogue, d’une générosité sans égale : ses petits analysés la « payaient » d’un menu objet, un marron par exemple, un ticket de métro périmé, peu importait, seul comptait le geste. Ce geste était symbolique et signifiait un accord, un engagement de l’enfant, un vrai investissement, bien qu’en fait gratuit : « J’accepte ton aide, j’en ai besoin, je la veux… et ce petit rien que je n’ai pas oublié d’apporter pour toi seule, il est un peu comme un objet transitionnel qui signifie que j’entre dans ton monde, dans notre monde d’échanges symbolique, car je sens bien qu’en retour je recevrai de toi infiniment plus que je ne peux te donner, sécurité relationnelle et confiance retrouvée dans l’autre. »
Et sa longue série d’émissions sur France Inter, par la suite éditée, (papier, CD, DVD), que de fureurs n’a-t-elle pas provoquées chez nombre de ses chers confères en psychanalyse ! Je crois bien que tout simplement on lui reprochait de donner des solutions, des trucs, des recettes, pas seulement pour guérir dans l’urgence l’enfant (et les parents) du cas évoqué, mais aussi pour prévenir chez bien d’autres la survenue de perturbations dans la relation, dans l’efficience, dans les attitudes. Car il y avait toute une foule de parents auditeurs qui l’écoutaient avec vénération leur dire, leur expliquer, leur démontrer, ce qui malheureusement peut arriver, et comment, souvent tout simplement, par l’écoute et la parole aimantes on peut faire que ça n’aille pas plus mal, que ça aille mieux, et même, surtout, que ça n’advienne jamais, à nos petits à nous, toute cette souffrance dont cette grande dame parle avec le gentil Jacques Pradel.
Thierry Janssen, lui, a interrompu sa carrière de chirurgien urologue, pour mieux « se reprendre », se ressaisir, se ressourcer, lui aussi a toujours voulu expliquer, démystifier, mettre à portée de tous dans une langue limpide les concepts les plus ardus, au point qu’on l’appelait « Thierry J’enseigne ».
Repensez aussi à J.-D. Nasio, à la force de sa vocation, revoyez ses seuls titres : « Enseignement de 7 concepts cruciaux de la psychanalyse » / « Introduction aux œuvres de Freud, Ferenczi, Grodeck, Klein, Winnicott, Dolto, Lacan » / « Le plaisir de lire Freud », toujours ce désir, ce besoin de transmettre, de faire passer, de partager ses enthousiasmes, en expliquant par le menu, au besoin en créant de nouveaux concepts plus clairs.

P.E.R. : Programmé pour l’Épanouissement et la Réussite.
Aussi, je voudrais que vous repreniez la série déjà fournie des articles du blog qui approchent, tentent de cerner ces notions, ces principes de base, qui font que le petit d’homme, de tout temps et en tous lieux, de la préhistoire à nos jours et sous toutes les latitudes est sans aucun doute possible programmé pour s’épanouir et réussir.

Ainsi, avec en arrière-plan ces principes du PER, sur cette base d’une programmation génétique pour l’épanouissment et la réussite, nous allons désormais nous consacrer surtout aux MER, à la réalisation, à la mise en œuvre.